Il y a un paradoxe auquel beaucoup de personnes en situation de handicap, de maladie chronique ou de neuro-atypie sont confrontées : d’un côté, on se sent accusé, jugé, mis à l'écart par les autres, souvent parce qu’on est perçu comme différent. D’un autre côté, on porte souvent un regard très dur sur soi-même, parfois même plus impitoyable que celui des autres. Cette autocritique sévère peut devenir une prison intérieure, un poids qui nous empêche d’avancer. Et ce qui rend cette situation encore plus complexe, c’est que parfois, on pense que le problème vient entièrement de l'extérieur, des 'méchants' qui ne nous comprennent pas, alors que la vraie bataille commence à l'intérieur de nous-mêmes.

Le miroir des autres
Dans ce contexte, il est facile de croire que le monde extérieur est la source de tous nos maux. La société, les jugements, les étiquettes, les regards lourds de préjugés… C’est vrai qu’ils existent, et qu'ils font mal. Mais cette attitude peut devenir une armure, un mécanisme de défense qui nous pousse à croire que c’est toujours les autres qui ont tort. Pourtant, si on creuse un peu, on se rend compte que ce qui nous blesse encore plus profondément, c’est le regard que l’on porte sur nous-mêmes.
Quand on n’a pas confiance en soi, que l'on doute constamment de sa valeur, on se met à rechercher une validation extérieure. Et quand cette validation ne vient pas, on se sent rejeté, encore plus différent, et on tombe dans une spirale de souffrance. Le regard des autres devient une sorte de miroir déformé qui reflète nos propres insécurités. Il ne fait que renforcer ce que l’on ressent déjà intérieurement : que l’on n’est pas assez bien, pas à la hauteur, que l’on ne mérite pas notre place.
Le piège de la victimisation
C’est là qu’intervient un piège bien connu : celui de la victimisation. Quand on se sent incompris et rejeté, il est facile de se dire que les autres sont responsables de notre mal-être. On se voit comme une victime des circonstances, des préjugés, de l’ignorance des autres. Et on attend, parfois indéfiniment, que les autres changent, qu'ils soient plus tolérants, plus ouverts, qu'ils comprennent enfin qui nous sommes vraiment.
Mais cette attente peut être interminable. Parce que, dans bien des cas, le regard des autres ne changera pas tant que le nôtre ne changera pas. C’est là une vérité difficile à avaler, mais libératrice : si tu veux que les autres changent de regard sur toi, il faut d’abord que tu changes ton propre regard sur toi-même.
Prendre la responsabilité de son estime de soi
Cela ne veut pas dire que les autres sont exempts de leur part de responsabilité. Les jugements, les stigmatisations et les discriminations existent bel et bien, et ce n'est pas juste. Mais en restant dans cette posture d’attente ou de ressentiment envers les autres, on se prive de notre pouvoir. Le pouvoir de changer ce que nous pouvons contrôler : notre perception de nous-mêmes.
Si on veut que le monde nous voie différemment, on doit commencer par se voir différemment. Ce travail d'auto-acceptation, d'auto-compassion et de réconciliation avec soi-même est essentiel. Cela demande de prendre conscience de la valeur que l’on a, indépendamment des regards extérieurs. De reconnaître que notre différence – que ce soit à cause d’un handicap, d’une maladie ou de notre neuro-atypie – est une partie de nous, mais ne nous définit pas entièrement.
Lorsque l’on apprend à accepter pleinement qui l’on est, avec nos forces et nos vulnérabilités, le regard des autres commence à perdre de son emprise. Parce qu’en vérité, ce qui attire le mépris ou le rejet chez les autres, c’est souvent le reflet de nos propres insécurités. Quand tu te portes en haute estime, les autres sont forcés de réajuster leur propre perception.
L'effet miroir inversé : comment changer les choses
On sous-estime souvent l'impact de notre propre perception de nous-mêmes sur la manière dont les autres nous perçoivent. Si tu penses constamment que tu n’es pas à la hauteur, que ta différence est un défaut, que tu n’es pas légitime dans tes interactions avec le monde, cela se ressent. Non pas parce que tu le dis ouvertement, mais parce que les autres captent ton énergie, tes hésitations, ton manque de confiance.
Quand tu travailles sur toi-même et que tu commences à te dire : « Oui, je suis différent, et alors ? », tu envoies un message clair à ceux qui t’entourent. Tu ne cherches plus la validation extérieure parce que tu l’as déjà trouvée en toi. Cette transformation intérieure change tout : les autres commencent à te voir non plus comme une personne à part ou 'moins que', mais comme quelqu’un qui s’accepte pleinement et qui ne se laisse pas définir par sa différence. Et devine quoi ? Ce regard plus bienveillant et respectueux des autres finit par suivre.
Comment initier ce changement intérieur ?
1. Reconnaître tes forces : Trop souvent, on se focalise sur nos limites, nos faiblesses. Mais chaque différence, chaque difficulté cache aussi des forces uniques. Qu'est-ce que ton parcours t'a appris ? Quelles compétences et qualités as-tu développées grâce à tes épreuves ? Valorise ces aspects, car ils font partie de ce que tu es.
2. Changer ton dialogue intérieur : La manière dont tu te parles influe énormément sur ton estime de toi. Si ton dialogue intérieur est rempli de critiques et de doutes, il est temps de le transformer. Parle-toi avec bienveillance, comme tu le ferais avec un ami cher.
3. Entoure-toi de personnes positives : Cherche des personnes qui te soutiennent, qui te voient tel que tu es vraiment et qui t'encouragent à être toi-même. Cela ne veut pas dire fuir les autres, mais s'assurer que l'on ne se laisse pas enfermer dans un cercle de jugements négatifs.
4. Affirme-toi : Apprends à te positionner, à défendre ton droit d’exister tel que tu es. Ne cherche pas à plaire à tout le monde, mais sois en paix avec qui tu es. Ton authenticité attire ceux qui te comprendront.
Le regard des autres est secondaire
En fin de compte, ce que pensent les autres n'a que le poids que tu lui donnes. Plus tu t’acceptes et t’estimes, moins tu seras affecté par leurs jugements. Changer le regard que tu portes sur toi-même, c'est changer la base de ta relation au monde. C'est arrêter de chercher constamment à rentrer dans un moule qui n'a jamais été fait pour toi.
Ton identité, ta différence, c’est ta force. Tu n’as pas besoin de prouver ta valeur aux autres. Mais quand tu commences à te voir avec plus de compassion, de respect et d'amour, les autres seront obligés de faire de même.
Alors, ne te laisse plus définir par les regards extérieurs. Prends la responsabilité de changer la perception que tu as de toi-même, et tu verras que le monde commencera, lentement mais sûrement, à te voir avec des yeux différents.
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